Rien n'effraie Camille Hermand, architecte DESA, diplômée de l'école spéciale d'Architecture. Agrandissements, rénovations, constructions… Depuis 20 ans, elle s’attelle à de nombreux chantiers - maisons, appartements, lofts, ateliers ou hôtels particuliers - avec toujours à cœur de créer des lieux uniques qui ressemblent à leur propriétaire. Au centre de tous ses projets, il y a toujours la cuisine. Elle est une pièce passionnante à concevoir. Et si chacun y projette son mode de vie, quelques tendances fortes émergent. Camille Hermand, en fine observatrice, constate ainsi que, désormais, grâce au développement de nouvelles offres et services, la cuisine sur mesure est à la portée de tous. Il n'y a plus le clan des «grandes enseignes» et celui des «cuisinistes de luxe». «Nul besoin, aujourd'hui, de dépenser des fortunes pour en faire une pièce pratique, élégante, à son image», précise-t-elle. Et c'est autour de cette idée qu'elle a identifié les 10 grandes envies du moment dans la cuisine.
«La cuisine ouverte a toujours la côte, pourtant on voit fleurir les verrières. Il ne s'agit pas tant de cloisonner, car la verrière est souvent semi-ouverte, mais de créer visuellement deux espaces entre la cuisine et le salon. De plus, les verrières ont beaucoup évolué. Elles ne sont plus systématiquement en métal, ce qui rimait avec un style industriel qui n'a plus le vent en poupe. Elles peuvent être en bois, ouvragées, et deviennent ainsi un véritable élément décoratif.»
«Le bois fait de plus en plus d'émules pour son côté chaleureux. Ce sont plus précisément les bois foncés, et notamment le noyer, qui font une percée remarquable du côté des rangements et placards. »
«La customisation des cuisines est désormais de mise. C'est une bonne nouvelle. Autrefois, pour avoir une cuisine personnalisée, il fallait passer par de grands cuisinistes. Désormais, grâce à des concepts comme Plum Living ou Bokclip – il y a de plus en plus de propositions sur ce créneau — on peut avoir, sans dépenser des fortunes, une cuisine d'esprit sur mesure. Il suffit d'utiliser les caissons et structures Ikea qui sont très accessibles et de les équiper des façades, accessoires ou poignées souvent originaux, proposés dans une large palette de matériaux et couleurs pour concevoir un agencement inédit. Évidemment, pour cette étape de personnalisation, je fais aussi appel à des artisans quand le budget le permet.»
«C'est, sans aucun doute, l'un des effets du COVID. Nous avons été traumatisés par la désinfection de tout ce qui entrait dans la cuisine. Résultat, il y a eu une demande croissante de plan de travail réalisés dans des matériaux aisément nettoyables. Le bois est de plus en plus écarté mais aussi la pierre que les clients jugent souvent poreuse, salissante. Ce sont donc les matériaux de synthèse à effet pierre qui sont, du coup, appréciés.»
«Finis les luminaires dédiés à la cuisine. On veut des luminaires qui ne sont pas faits pour cette pièce, plutôt conçus pour la salle à manger ou le salon. Ils sont plus design, plus élégants, et contribuent à créer une ambiance cosy, moins technique. C'est ce que j'appelle “l'éclairage bijou”. Pour apporter cependant un éclairage plus ciblé, nécessaire dans la cuisine, on travaille sur des bandeaux filants installés sous les placards.»
«Les fabricants de papiers peints ont enfin compris que leurs produits avaient leur place dans la cuisine. Ils développent donc de nombreux modèles aussi beaux que pour les autres pièces et résistants à l'humidité. La demande est au rendez-vous car, là aussi, cela permet d'apporter de la personnalisation et de l'élégance.»
«Le blanc domine dans la cuisine. Les clients veulent, en effet, une cuisine qui dure longtemps visuellement, dont ils ne vont pas se lasser car trop ancrée dans les tendances. Le blanc est donc l'option idéale. Mais avec un petit twist. Tout est alors dans le détail comme une niche ou un pan de mur peints dans une couleur qui tranche.»
«Longtemps, les clients ont été réticents à l'idée d'investir dans un évier et dans la robinetterie. Ce n'est plus le cas. La robinetterie est désormais la touche de style incontournable et on la coordonne même avec la bonde : c'est une excellente façon de pimper sa cuisine. Il y a actuellement un grand engouement pour les robinetteries en laiton. Ce souci du détail se retrouve également dans les interrupteurs de la cuisine : on va choisir de beaux modèles, parfois un peu plus chers, pour apporter un sentiment de raffinement. Les marques ont compris que ces éléments étaient importants, qu'il y avait une demande pour plus de design, de sophistication. Pour moi, la belle robinetterie, le bel interrupteur, c'est un peu comme le sac Chloé. On n'a pas les moyens de s'offrir la tenue complète mais on se fait plaisir avec l'accessoire !»
«Nos clients ont de moins en moins envie de carrelage dans leurs cuisines. Ils veulent souvent du parquet comme dans la salle à manger : cela crée une continuité. Ces envies sont facilitées par le travail des fabricants sur la résistance des planchers. Ils sont plus solides, traités contre les tâches - il n'y a plus d'angoisse à avoir dès que quelqu'un renverse un verre de vin.»
«J'ai toujours adoré les banquettes dans les cuisines. Mais quand j'en proposais à mes clients, il me répondait systématiquement : «on n'est pas dans un appartement au ski». Longtemps dans l'imaginaire, la banquette correspondait, en effet, à l'ameublement optimisé des chalets dans les stations de montagne. Or, c'est convivial une banquette ! Et ça y est, on s'en rend compte. Désormais, tout le monde en veut, c'est le revival de la banquette d'esprit 70's. Je pense qu'elle deviendra incontournable comme l'est aujourd'hui l'îlot.»
Texte : Vanessa Zocchetti
Photos : ©Agathe Tissier